Comment mettre une image sur une telle violence, un 24 juillet que personne n'oubliera !
Lundi matin, très tôt, nous sommes réveillés par notre chienne, car dehors le vent souffle fort. Notre grill est retourné, diverses choses s'envolent. Nous rangeons un peu la terrasse et nous retournons nous coucher, histoire de nous reposer du vide grenier de la veille.
Plus tard, au réveil, tout est calme dehors. Nous prenons le café en planifiant notre journée, quelques touches de ménage, le contrôle de nos mails et sommes tout contents car nous en avons reçu un pour des dons d'objets pour nos prochains vide greniers.
Il est 11h40 quand nos téléphones sonnent l'alerte. Nous apprenons qu'un déluge débarque sur la Chaux-de-Fonds et aux alentours. Sans réfléchir, juste un échange de regards, nous mettons en pause notre planning, sans connaître la situation. Nous comprenons que cela sera important et préparons nos affaires. En même temps, nous surveillons les infos minutes par minutes. Nous restons ébahis devant les premières vidéos qui pleuvent sur les réseaux...
La mise en action face à la situation est vite engagée ! Recherche d'infos, premières prises de contacts, finalisation de la préparation du matériel et départ.
Nous prenons tout ce qui pourrait être utile et nous partons.
Sur la route nous sommes silencieux, cela change de notre habitude, nous ne savons pas trop sur quoi nous allons réellement tomber et de plus nous n'avons aucun ordre de travaux ou indications de marche à suivre, donc pas évident pour nous qui sommes nouveaux.
On arrive à La Chaux de Fonds quand le deuxième orage arrive. On se met de suite à l'abri avec le bus à une station service car nous allions au Camping du Bois du Couvent. Comme son nom l'indique, il est à la lisière d'une forêt. Nous connaissons notre premier coup de stress, car nous gardons en tête les images de l'orage précèdent.
Il est très court et beaucoup plus calme que le premier.
Nous reprenons la route pour le camping de la Chaux-de-Fonds. Nous ne sommes pas à l'aise dans cette petite forêt où certains arbres penchent dangereusement. Sans trop échanger, nous comprenons l'un et l'autre que notre mission sera non sécurisée, longue et lourde émotionnellement.
Le camping est déjà vide, il ne reste que quelques personnes hagardes mais volontaires. Le gérant du camping vient rapidement à notre rencontre, nous nous présentons et lui expliquons pourquoi nous sommes là. Avec un regard perdu, il nous apprend que le camping doit être sécurisé avant tous travaux de remise en état et attend des nouvelles des bucherons. Nous lui laissons notre carte pour qu'il puisse nous appeler au moment venu. Dans ces moments, on voudrait rester un peu pour soutenir les personnes mais malheureusement l'ampleur de la situation fait que nous devons vite reprendre la route.
Nous nous engageons en direction du centre de la Chaux-de-Fonds. C'est très particulier, on passe de rues dévastées à des rues propres. Certaines personnes ne se rend pas encore compte des dégâts et continue à monter une scène de spectacles ou vaquer à leurs occupations comme si de rien n'était. Nous sommes un moment perdus par cette situation particulière qui nous choque !
On reprend notre véhicule et découvrons un monde à part... Un univers de désastre! Des bâtisses abîmées, des vitrines explosées, des boutiques vidées par le vent, des tonnes et des tonnes de tuiles sur la route. Pas un cm carré de béton n'est visible, vu la quantité de tuiles et déchets en tous genres.
Nous rencontrons des homme de la protection civile complètement dépassés par les évènements.
On leurs donne notre carte et leurs demandons ce que nous pouvons faire. D'un air vide, ils nous regardent et nous disent... "Faites comme nous, libérez le plus possible les routes et les caniveaux des tuiles et déchets pour éviter que cela se bouche et augmente le problème".
Dès la fin de sa phrase et sans chercher plus, nous nous mettons au travail, petits bouts par petits bouts. Une heure avec pelles et balais pour 3 mètres de route à deux. Plus tard nous arrivons à un carrefour plein de tôles, de briques et panneaux de signalisations, je demande à Gilles de s'arrêter plus haut dans la rue pour libérer l'endroit.
C'est horrible d'avoir cette impression d'être tout petit, trop petit, pour avancer plus vite.
Notre prochain obstacle sera un arbre au milieu de la route. Nous rencontrons par ailleurs un homme qui allait quitter les lieux car tout seul, impossible de la libérer. Nous nous mettons les trois au travail pour rouvrir cette rue. C'est alors qu'il nous apprend que le Crêt-du-Locle est encore plus touché et qu'il nous faut absolument atteindre cette région.
sur la route, nous découvrons un monde d'horreur. Des secteurs complètement dévastés. On nous parle de tempête mais nous, on a l'impression de remonter le passage d'une tornade. Un couloir de destruction massive.
Par où commencer ? Quoi entreprendre? Qui aider en premier ?
Nous sommes complètement perdus par la vision de cette catastrophe.
Malheureusement il est déjà 21h00 et nous sommes épuisés. Nous comprenons que nous devons rentrer nous reposer pour revenir demain matin.
Sur la route du retour, un silence pesant. Des corps oppressés mais nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers et devons vite prendre les choses en mains. Recherche de matériel (remorque), liste d'achats, demande de bénévoles et préparation de contacts avec les autorités. Il est plus de 2 heures du matin quand nous partons nous coucher mais le sommeil n'est pas facile à trouver. Les questions sur la situation de demain et la visions du jour n'apaisent pas !
Mardi:
Nous avons rendez-vous pour le prêt d'une remorque. Notre appel lancé la veille a réussi ! Un soutien super important qui nous sera très utile ces prochains jours.
Nous devons trouver rapidement une tronçonneuse, car celle que nous avons est électrique, donc pas évidente d'utilisation sur cette catastrophe. Il nous faut aussi quelques outils supplémentaires. Tout comme les sacs à poubelles 110 litres qui deviendront indispensables tous les jours de notre mission. Une chose à laquelle nous n'avions pas pensé!
Nous arrivons vers 9h00 au début de la Chaux-de-Fonds mais notre lieu à atteindre et le Crêt-du-Locle, celui que nous avions quitté la veille.
Sur la route nous décidons d'avancer gentiment et de nettoyer au mieux la route que nous prenons. Nous faisons des tas de branches d'arbre, de tôles, et plastique, verre en tous genres, nous découvrons aussi les joies des panneaux solaires, un élément prisé actuellement mais un danger futur si aucune modification n'est faite.
Jusqu'à ce jour, jamais nous n'aurions imaginé le danger de cet objet écologique, on nous a présenté un produit innovant et bon pour le futur, une source d'énergie écologique mais nous n'avons pas pensé à la colère de la nature. Sa fabrication a été faite sans penser à la folie de mère nature. Alors aujourd'hui, nous nous retrouvons avec des routes, mais surtout des champs, remplis de panneaux solaire, remplis de petites briques de verre appartenant à ceux-ci. ils éclatent comme un parebrise, donc je vous laisse imaginer la situation actuelle là-bas.
Nous pénétrons dans un monde de vision de film au cinéma ou encore des images d'autres pays que nous voyons à la télévision.
Ce que nous constatons très rapidement, c'est le partage et l'entraide par quartier d'habitations. Tout le monde se soutient, s'aide, s'engage dans divers secteurs. Mardi après-midi nous recevons les premiers contacts de la commune de la Chaux-de-Fonds, ils reçoivent des appels de bénévoles mais ne savent pas, pour le moment, où les envoyer. Comme nous sommes présents depuis lundi, ils nous transfèrent les appels des bénévoles que nous acceptons avec plaisir.
Nous n'avions pas pensé à cette nouvelle gestion qui prend vite du temps et de l'ampleur. Mais nous remercions infiniment la commune de la Chaux-de-Fonds pour sa confiance.
Mercredi matin
La commune nous contacte pour l'arrivée d'un camion d'une entreprise de toiture pour les Sinistrés qui en ont besoin en Urgence. Nous acceptons la mission même si cela nous paraît immense et sans fin mais surtout, nous devrons entrer dans un secteur inconnu. Entrer en contact avec de grands sinistrés, sans violer leurs vies privées, tout cela avec un immense respect.
Ne pas lâcher un brin d'émotion devant eux, garder notre sang froid malgré les rencontres fortes en émotions.
Plus tard dans la journée un 2ème camion nous a contactés pour avoir, lui aussi, des adresses pour la pose de toitures provisoires.
Nous sommes submergés d'émotions mais nous devons garder la tête froide pour gérer cette situation particulière. Nous avons reçu une cinquantaine d'appels pour des aides bénévoles. Un mouvement incroyable se forme autour de notre petite association.
Un élan de confiance et de partage que nous n'avions pas imaginé.
En même temps, nous continuons nos aides aux sinistrés. Nettoyage, ramassage, passages multiples en déchèterie. Rues, maisons, champs, quartiers, cimetières, nous essayons d'être partout.
Le jeudi
Nous avons notre premier contact avec la commune du Locle. Une commune un peu oubliée par les médias, qui a vécu suivant les secteurs de gros dégâts.
Nous recevons un mandat pour le nettoyage d'un champ que nous acceptons de suite.
Au final, en plus du champ, nous aiderons un petit quartier très soudé.
Depuis cette journée, nous sommes aussi en contact permanent avec la commune du Locle et nous prenons nos mandats jour après jour des communes ou des sinistrés directement.
Depuis lundi 24 juillet nous avons été présent chaque jour pour accomplir diverses aides.
Nous aurons pris un jour de repos le 1 er août et aujourd'hui dimanche où je vous écris !
Nous avons vécu ce que nous pensions vivre plus tard, d'ici 2 ou 3 ans.
Nous resterons marqués par cette mission, qui sera la première de grande ampleur. Nous avons encore les mots qui manquent parfois dans notre récit et par moments de petites larmes coulent tellement se fût chargé en émotions.
Il n'y aura plus de 24 juillet où nous ne penserons pas à vous Tous, habitants sinistrés, par cette colère de mère nature!
Nous y serons encore cette semaine, mais la fin de notre mission approche. Il reste beaucoup de travail à faire mais celui-ci est pour des corps de métier spéciaux.
Gilles et moi-même tenons à remercier du fond du cœur :
Tous les sinistrés du Crêt-du-Locle
Tous les sinistrés du Locle
La Commune du Locle
Mme Favre du Conseil communal du Locle
La Commune de la Chaux-de-Fonds
La Sécurité publique du Locle
La Voirie
Un IMMENSE MERCI à TOUS nos Bénévoles!
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